Immobilier : Benoist Apparu ne voit pas de reprise à court terme | Le Journal du Grand Paris

C’est un scénario catastrophe que le président d’Emerige a dressé le mardi 19 septembre à Paris devant les membres et invités du Cercle des élus locaux. La crise que vit le secteur de l’immobilier est non seulement inédite, mais ne présente aucun signe de reprise. Aussi, Benoist Apparu invite-t-il à changer de paradigme. La crise de l’immobilier est « profonde, durable et à multi conséquences », a résumé Benoist Apparu le 19 septembre 2023, invité à décrypter cette situation inédite devant le Cercle des élus locaux. Ce think tank, co-fondé en 2022 par Hugues Anselin, président de Fursac, Anselin & associés, et Etienne Lengereau, maire de Montrouge (Hauts-de-Seine), se présente comme un « institut de formation au service des élus locaux et un laboratoire d’idées au service de l’intérêt général ». Pour le maire de Châlons-en-Champagne et président du promoteur Emerige, les causes sont anciennes. « Le rythme de production de logements est ralenti depuis les années 1980 », a-t-il rappelé, pointant deux erreurs majeures : l’une économique avec l’explosion des prix sans que les revenus ne suivent et la disparition des foncières du marché. L’autre erreur a été de ne pas tenir compte des évolutions démographiques pays par pays (flux de population, divorce, allongement de la durée de la vie…), ce qui a engendré une « inadéquation complète entre les besoins et l’offre ». Dès lors, « la question ne devait pas être de savoir combien de logements il fallait produire, mais où il fallait les construire », a taclé l’ancien ministre du logement de Nicolas Sarkozy.

Effondrement « très durable » de la production

Si la crise de l’offre existe depuis une trentaine d’années, « la situation actuelle est anachronique, car il s’agit d’une crise à la fois de l’offre et de la demande, a déclaré Benoist Apparu. On ne produit pas suffisamment et les produits ne se vendent pas ». Les ventes d’Emerige par exemple ont chuté de 55 % en un an. Il prévoit un effondrement de la production « probablement très durable », puisque les achats de terrain sont quasiment à l’arrêt. « Les promesses de vente signées cette année pour l’acquisition d’un terrain ne se concluront par un acte définitif que dans deux ans et les travaux débuteront deux ans plus tard », a rappelé Benoist Apparu. Sauf que « nous n’achetons quasiment plus de terrain », a-t-il également admis. Ainsi, Emerige a divisé par 2,5 ses approvisionnements car le promoteur ne mobilise que ses fonds propres, faute d’accès à des financements abordables. « Les marchés obligataires sont à l’arrêt sur l’immobilier », a souligné le patron d’Emerige. Dans ce contexte alarmant, « pourquoi les pouvoirs publics n’ont-ils pas pris la mesure de l’enjeu au travers notamment du CNR logement (conseil national de la refondation) ? », a interrogé Etienne Lengereau. « Parce que l’on a voulu faire jouer à ce CNR un rôle qui n’était pas le sien, à savoir la gestion de crise, alors qu’il devait inventer des politiques publiques à 20 ou 30 ans », a répondu Benoist Apparu, ce qui ne pouvait pas répondre aux enjeux du moment au regard de la situation.

Outil de relance sur les terrains disponibles

Le président d’Emerige a toutefois pointé du doigt les promoteurs qui « n’ont pas su imaginer une nouvelle façon de fonctionner depuis plusieurs années », se contentant comme « beaucoup d’acteurs de demander de l’argent à l’Etat dès qu’un l’article problème se présentait ». « Tout le monde sait, a-t-il ajouté, que tout l’argent public mis dans le secteur immobilier se retrouve dans les prix sans retour quantifiable sur investissement pour l’Etat ». Aussi, il qualifie de positif le rachat par Action logement et CDC habitat des logements en bloc dans des opérations bloquées. Ce qui manque en revanche, selon le maire de Châlons-en-Champagne, est un outil de relance sur les terrains disponibles. S’il ne voit pas de réponse à court terme à la crise du logement, Benoist Apparu préconise quelques pistes à explorer, notamment en matière de financement, à l’instar du crédit in fine, du BRS (bail réel solidaire) qui pourrait s’étendre à d’autres produits (intermédiaire et libre), du leasing immobilier ou encore de l’accession progressive à la propriété. Rien à attendre en revanche selon lui du côté d’une baisse des coûts de construction. Aussi la seule façon de les réduire serait d’agir sur le foncier. Outre la reconversion de l’existant (friches, bureaux, parking), Benoist Apparu appelle à « une intervention publique massive » pour mettre des fonds dans les établissements publics fonciers afin de « maitriser les coûts du foncier »